Je pose le manuscrit sous le museau d'un gros phoque qui semble patauger dans la fange de sa graisse : Martial Klarsfeld... il regarde à peine deux trois lignes et marmonne - réjaculations de bave à chaque phonème bilabial - quelque : « ouiche, pas mal hein petit, vous êtes un bon écrivain je pense. Mais qui vous lira ? Ouais... non ça n'intéresse personne, ça gagnera des prix, mais ça ne se vendra pas... » Avec l'air d'un type qui vient de foutre sans plaisir, il repose mon machin, ferme les yeux, agglutine de nouveau sa graisse au fond de sa chaise puis inspire. Il se redresse. Il reprend le livret dans ses mains, tête de morue prête à dégobiller - le gros porc a sans doute trop mangé à midi ou trop bu la veille au soir - il reprend le livret, dis-je, et vomit ces derniers mots : « Continuez d'écrire mon brave, mais soyez moins acerbe, moins politique, moins catholique, ça ne marche plus tout ça, écrivez de belles histoires de petites gens qui réussissent, de voisinages heureux. Vos bondieuseries sombres à la Bloy, votre Claudel mystique là... ça nous dégueule tous... désolé. » 
Un relent lui vient, il feutre un rot dans son thorax de pourceau, se redresse. Je pars, non sans lui beugler un triste : « Vous brûlerez ! goret maudit ! Vous brûlerez ! » 